Bulletin Spécial Grippe 2022 : Foire aux Questions (FAQ)
InfoVac vous propose les questions-réponses les plus fréquentes et instructives sur la vaccination contre la grippe
Quels sont les vaccins disponibles pour la saison 2022-2023 ? Pour la saison 2022-2023, 4 vaccins antigrippaux sont disponibles, d’une part le Fluarix Tetra®, Influvac Tetra®, Vaxigrip Tetra®, et d’autre part un vaccin plus fortement dosé Edlueda® réservé au plus de 60 ans. Pour les enfants, contrairement à l’année dernière, le Fluenz Tetra® vaccin vivant nasal ne sera pas disponible en France.
A quel moment faut-il vacciner ? La prédiction d’une épidémie est une science inexacte ! La protection par les vaccins antigrippaux actuels est d’assez courte durée (quelques mois) surtout chez les adultes seniors. L’épidémie, certaines années précédentes, a pu atteindre son pic en décembre, la vaccination devait être terminée mi-novembre. Cette année personne ne peut dire quand elle surviendra. L'idéal est donc de ne pas vacciner trop tôt... mais pas trop tard non plus (pour ne pas être surpris par la "vague" épidémique) ! Le mois de novembre est donc le plus propice, avec les vaccins disponibles. Contrairement à l'information véhiculée par la grande presse : "la grippe est là ! Il est trop tard pour vacciner", il est toujours temps de vacciner un sujet à risque à partir de l’âge de 6 mois, qui n'a pas eu la grippe, même en pleine épidémie de grippe saisonnière, car il suffit d’environ 2 semaines pour développer une immunité protectrice. Pour les personnes auxquelles le vaccin est recommandé (et remboursé), l’usage du bon émis par la sécurité sociale, adressé au domicile, est valable jusqu’à fin janvier ; si ce bon n’a pas été reçu (ou a été perdu), tout médecin peut le retrouver sur le site Ameli.
La vaccination contre la grippe est-elle vraiment recommandée pendant la grossesse ? Oui, absolument, la vaccination est officiellement recommandée, en France... depuis 2012 comme dans de très nombreux pays dans le Monde. Non seulement, ce vaccin protège la mère (plus à risque de formes graves), mais protège aussi l’enfant : plusieurs études randomisées de grande ampleur montrent que la vaccination des futures mères dans le dernier trimestre de grossesse protège leurs nourrissons au cours des 4 premiers mois de vie contre la grippe (Zaman K, N Engl J Med 2008 ;359 :115]. Deux études sont venues renforcer ces données (Madhi N Engl J Med 2014 Sep 4; 371:918. Dabrera, Eurosurveillance 2014 ;19 ; Novembre). Depuis, bien d’autres études sont venues confirmer l’efficacité de la vaccination antigrippale chez la femme enceinte. Une recommandation de leur gynécologue pour convaincre les futures mères est essentielle (Blanchard-Rohner G et al,J Matern Fetal Neonatal Med. 2012, données annuelles du CDC). Mais il faut du temps (trop en France...) pour changer les pratiques…
Une mère qui allaite peut-elle être vaccinée contre la grippe si son enfant est âgé de moins de 6 mois ? Oui ! L’allaitement ne constitue pas une contre-indication à la vaccination antigrippale. Les vaccins disponibles en France sont des vaccins inactivés sans aucun pouvoir infectieux. Il n’y a donc aucun risque de transmission du virus par le lait maternel… et protéger la mère est une bonne façon de protéger l’enfant ! Ceci est même recommandé pour l’entourage proche d’enfants appartenant à un « groupe à risques » justifiant la vaccination, mais encore trop jeunes pour être vaccinés.
Y a-t-il un vaccin contre la grippe à préférer pour les femmes enceintes ou qui allaitent ? Non, les 3 vaccins Fluarix Tetra®, Influvac Tetra®, Vaxigrip Tetra® peuvent être utilisés chez la femme enceinte. Les vaccins avec adjuvant ou le vaccin vivant nasal n’ont pas l’AMM chez la femme enceinte.
Les vaccins contre la grippe saisonnière disponibles pour la saison 2022-2023 contiennent-ils un adjuvant ? Non !! pas en France. Chez les 60 ans et plus, la nécessité de vaccins plus immunogènes fait encore appel cette saison à un vaccin fortement dosé (Efluelda®).
Quel délai faut-il respecter entre un vaccin contre la grippe et un vaccin contre la COVID en rappel ou en primo-vaccination ? Aucun maintenant, les deux vaccins peuvent être administrés le même jour ou avec n’importe quel délai.
Y a-t-il des intervalles à respecter entre les vaccins contre la grippe et les autres vaccins ? La vaccination contre la grippe diminue (un peu) les réponses au Prevenar 13® si les deux vaccins sont administrés en même temps. Pour optimiser les réponses, mieux vaut donc les décaler de 4 semaines si cela est possible. Si prévoir 2 visites à un mois d’intervalle est compliqué, il vaut mieux administrer les deux vaccins en même temps que de courir le risque que le deuxième vaccin ne soit pas fait ! Sinon, n’importe quel intervalle est compatible entre le vaccin grippe et n’importe quel autre vaccin !
Peut-on toujours faire les vaccins contre la grippe en voie sous-cutanée chez les patients sous traitement anticoagulant ? C’est possible… puisque les vaccins contre la grippe ne contiennent pas d’aluminium (qui provoque de fortes réactions lors des injections sous-cutanées). MAIS l’injection sous-cutanée diminue l’immunogénicité des vaccins – et celle des vaccins contre la grippe n’est déjà pas extraordinairement forte ! Nous conseillons fortement pour de si petits volumes à injecter (0.5 ml) une injection intramusculaire, avec pression (sans tourner) au point d’injection pendant 3 minutes, à tous les patients sans saignement spontané (hématome) du fait d’un traitement anticoagulant. Même aiguille que pour les autres ???
Peut-on vacciner contre la grippe les patients allergiques à l’œuf ? Oui !!! Bien que dans le RCP, l’allergie à l’œuf soit une contre-indication, on peut vacciner ces patients !!! Les vaccins antigrippaux inactivés étant généralement cultivés sur œuf, la présence de traces d’ovalbumine dans le produit final a fait craindre la survenue de réaction anaphylactique et a donc fait contre-indiquer dans de nombreux pays tous ces vaccins chez les patients allergiques à l’œuf. Avec les méthodes de purification actuelles, les concentrations de protéines de l'œuf sont infimes, ce qui explique l'extrême rareté des réactions anaphylactiques. De ce fait, il existe très peu de données objectivant et quantifiant le risque de réaction anaphylactique après vaccination antigrippale si bien que les recommandations sont très variables d’un pays à l’autre. Dans certains pays, une vaccination normale (accompagnée d’une courte période de surveillance dans le lieu de vaccination) est conseillée, dans d’autres, une augmentation progressive des doses est proposée, et dans d’autres pays encore, la vaccination est complètement contre-indiquée. La crainte de la pandémie H1N1 en 2009 a suscité de nombreuses études sur la sécurité vaccinale – y compris chez des patients à risques élevés d’anaphylaxie à l’œuf. Les résultats sont concordants : la vaccination contre la grippe est bien tolérée même chez les patients allergiques à l’œuf. Les recommandations américaines ne considèrent l’allergie à l’œuf ni comme une contre-indication, ni impliquant une précaution d’emploi. Une attitude raisonnable est de vacciner les personnes allergiques à l’œuf et relevant des recommandations vaccinales :
- dans les lieux habituels de vaccination, sans précaution particulière, mais avec les précautions d’usage, les patients à faible risque (réactions digestives ou cutanées modérées), les plus nombreux,
- dans ces mêmes lieux, sous antihistaminique et en prolongeant la période de surveillance, ceux qui ont présenté une urticaire généralisée sans réaction cardio-respiratoire,
- en milieu hospitalier seulement ceux qui ont fait des accidents plus graves (bronchospasme, réaction cardiorespiratoire, anaphylaxie).
Quelle efficacité peut-on escompter quand un patient est vacciné contre la grippe ?
Il n’y a pas de doute quant à l’efficacité de la vaccination contre la grippe comme en témoigne la forte diminution de la mortalité attribuée à la grippe ces dernières années. Cependant évaluer l’importance de la protection du vaccin antigrippal injectable classique est une question difficile pour de multiples raisons :
- Pour s'adapter au mieux aux souches en circulation, certaines souches du vaccin changent d’année en année (selon les décisions de l’OMS, appliquées à tous les vaccins commercialisés). L’efficacité varie en fonction de l’adéquation entre les souches qui vont circuler et la composition du vaccin administré. Mais une protection partielle vaut le plus souvent mieux que pas de protection du tout…
- L'immunité antérieure : on sait qu'une maladie "naturelle" avec un virus grippal identique (ou très proche) protège très longtemps, voire à vie… Si des sujets témoins vaccinés sont déjà immunisés, l'efficacité mesurée du vaccin sera quasiment nulle. Mais il n’y a pas de risque à vacciner une personne déjà immune…
- La capacité immunitaire des sujets vaccinés : les vaccins sont moins efficaces chez les séniors et les sujets dont l’immunité est affaiblie par une ou des maladies chroniques ou l’immunosuppression. Mais prédire l’efficacité individuelle reste à ce jour impossible, comme pour tout vaccin, justifiant la vaccination même des plus vulnérables…
- L'intensité de l'épidémie de l'année de l'étude : si elle est faible, démontrer l’efficacité du vaccin est difficile !
- Les critères d'efficacité utilisés : mortalité, mortalité attribuable directement à la grippe (par des tests biologiques et lesquels), hospitalisations, hospitalisations directement liées à la grippe, syndrome grippal, grippe prouvée.
Pour la saison grippale 2021-22, l’efficacité des vaccins sur le terrain en Europe a été évaluée à 35% ce qui est dans la fourchette basse d’ « effectiveness » des vaccins antigrippaux. Mais on ne connait aucun moyen plus efficace de prévenir la grippe et pour la saison 2022-23, l’OMS a modifié la souche H3N2 et une des souches B des vaccins disponibles cette saison.
Si l'on prend l'exemple de l'efficacité chez les sujets de 65 ans et plus (Vaccines 5ème édition (Plotkin & al) :
- une seule étude randomisée comparative a été publiée : l’efficacité vaccinale de 58% a suffi à rendre « non éthique » toute autre étude d’efficacité chez les seniors versus placebo.
- de nombreuses études de cohortes et cas témoins : efficacité variant entre 0 et 87%, selon les facteurs décrits plus haut notamment la concordance entre souches circulantes et souches vaccinales.
Enfin la dimension collective de la vaccination est aussi à prendre en compte : contrairement à une idée répandue, le virus de la grippe saisonnière est moins contagieux que la rougeole, la coqueluche, la varicelle, la Covid et bien d’autres maladies : le R0 avoisine en règle 1.5 à 2. Néanmoins, les sujets immunisés protègent en partie les autres, notamment dans les collectivités semi closes (maisonnées, maisons de retraite, milieux hospitaliers). Plusieurs études montrent que la vaccination des soignants est susceptible de protéger les patients hospitalisés.
Est-ce qu’il y aurait potentiellement un risque pour une personne vaccinée qui serait positive sans le savoir (soit en phase préclinique soit forme asymptomatique) ? Que ce soit pour la grippe ou les autres vaccins non vivants ? Non !!! Quand un sujet est asymptomatique, quelle que soit la circulation virale, il est impossible de déterminer ceux qui sont déjà positifs de ceux qui ne le sont pas. Cela ne justifie en pratique ni un test (antigénique, PCR) ni une sérologie avant une quelconque vaccination. Dans des situations mieux connues, comme les épidémies saisonnières de grippe ou de bouffées épidémiques de rougeole, personne ne prévoit d’arrêter de vacciner avec d’autres vaccins sous prétexte que l’on pourrait être en période d’incubation sauf s’il y a une notion claire de contact avec un cas index ou si le vaccin n’est pas urgent à pratiquer. On peut alors se donner un peu de temps pour éviter le chevauchement de la maladie et des réactions aux vaccins. On ne vaccine pas pendant la période aiguë d’une maladie, mais une fièvre discrète (inférieure à 38°5C) occasionnée par une infection bénigne (« rhume » lié à un autre virus) n’est pas une contre-indication
Les médicaments homéopathiques préviennent-ils la grippe ? Non !! Le HCSP souligne que les médicaments homéopathiques ne peuvent se substituer aux vaccins contre la grippe.
Combien de doses de vaccin antigrippal doivent recevoir les enfants ? Il faut 2 administrations (à un mois d’intervalle) aussi bien pour les vaccins inactivés injectables que vivants par voie nasale pour induire l’immunité chez un enfant encore jamais vacciné, ni exposé à la grippe. L’âge auquel une exposition grippale préalable permet des réponses suffisantes à une seule dose de vaccin a été fixé à 9 ans après plusieurs études démontrant une immunogénicité meilleure avec deux doses à un mois d’intervalle avant cet âge. Chez les enfants de moins de 9 ans : 2 administrations du vaccin antigrippal en primovaccination, puis une seule les années suivantes pour rappel.
Pouvez-vous me rappeler qui devrait avoir une demi-dose de vaccin grippe ? Personne !!! Pour des raisons historiques (tolérance des anciens vaccins à virus entiers), l’utilisation d’une demi-dose de vaccin inactivé injectable avait été officiellement recommandée pour les enfants de moins de 3 ans. Ce n’est plus le cas maintenant avec les vaccins actuels qui s’administrent en dose pleine (entière) quel que soit l’âge.
En cas de pénurie de vaccins contre la grippe, serait-il sensé ou déraisonnable de ne donner qu’une dose au lieu de deux aux enfants < 9 ans, vaccinés pour la première année, afin de pouvoir en vacciner deux fois plus ? La supériorité d’immunogénicité et d’efficacité de 2 doses de vaccin grippe pour les enfants de moins de 9 ans a été démontrée pour chaque souche : ces jeunes enfants n’ont pas encore eu le temps d’être en contact avec les 4 souches de grippe et donc d’acquérir une mémoire immunitaire pouvant être réactivée par une seule dose de vaccin. Mieux vaut obtenir une protection fiable chez moins d’enfants à risques, qu’une protection sans doute très partielle chez beaucoup d’entre eux et nous osons espérer que la plupart des enfants à risques ont déjà été vaccinés l’année dernière.
Pourquoi ne pas vacciner avant 6 mois les enfants à risque ? Parce qu’il n’y a pas d’études démontrant l’immunogénicité, l’efficacité et la tolérance dans cette tranche d’âge. (On peut le regretter). Il est de ce fait indispensable de vacciner l’entourage immédiat.
Faut-il vacciner les anciens prématurés sans pathologie pulmonaire ou cardiaque associée contre la grippe ? L’académie américaine de pédiatrie considère tous les prématurés comme étant à haut risque de complications et recommande la vaccination à partir de l’âge de 6 mois. Il en est de même en Suisse. En France, les recommandations officielles (2008) incluent les personnes ayant une affection broncho-pulmonaire (dont asthme, dysplasie broncho-pulmonaire et mucoviscidose) ou cardiaque grave. La prématurité isolée n’est pas mentionnée, le calendrier vaccinal proposant la vaccination de l’entourage familial direct des enfants nés prématurément. Cela dit, toute personne voulant se protéger contre la grippe peut le faire… cela peut s’appliquer aussi aux enfants nés prématurément en France ! mais ils ne seront vraisemblablement pas remboursés.
Un enfant de 30 mois, asthmatique, a reçu l’année dernière, pour sa première année de vaccination antigrippale, une seule dose de vaccin inactivé injectable. Que lui proposer cette année alors que son état justifie toujours un traitement de fond ? L’ACIP propose de faire alors 2 doses la saison suivante. En revanche, pour un enfant n’ayant reçu qu’une seule dose mais deux années consécutives, une seule dose sera suffisante les années suivantes.
Une maman m’a demandé de vacciner ses enfants contre la grippe par le Fluenz® (vaccin vivant intra-nasal) qu'elle aimerait acheter en Allemagne. Pourriez-vous me donner votre avis à ce sujet ? En effet, le vaccin vivant intra-nasal (VVN) a montré une efficacité intéressante a montré une efficacité clinique supérieure aux vaccins inactivés contre la grippe chez l’enfant, en particulier en primo vaccination. Ces vaccins sont très bien tolérés (compter seulement avec rhinite ou congestion nasale) dès l’âge de 2 ans. !
Un de mes patients de 2 ans souffrant d’un syndrome de Sturge-Weber a présenté une grippe A grave en 2022 avec état de mal convulsif malgré 2 doses de vaccins antigrippal. Quels arguments donner à ses parents pour le vacciner cette année et à quel moment proposer le vaccin ? Les vaccins contre la grippe ont une efficacité difficilement prévisible d'une année sur l'autre. Les meilleures années, quand les souches contenues dans le vaccin correspondent aux souches responsables de l'épidémie, le taux d'efficacité avoisine 70%. Les années les plus défavorables (comme l’année dernière), l’efficacité est beaucoup plus basse pouvant descendre à 20 à 30%. Il faut protéger cet enfant particulièrement fragile qui n’est pas à l’abri d’une nouvelle grippe compliquée. Même une protection incomplète sera toujours bonne à prendre. Une seule dose est maintenant nécessaire et le meilleur moment pour le vacciner est durant le mois de novembre.
Robert Cohen, Didier Pinquier, Véronique Dufour, Catherine Weil-Olivier
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