Bulletin N°5 - Mai 2024

Bulletin N°5 - Mai 2024

Les cas de rougeole augmentent encore en Europe et particulièrement en France. Si le fait de ne pas être vacciné augmente de façon considérable le risque de contracter une rougeole, une dose ne suffit pas toujours et des échecs sont rapportés après 2 doses, notamment chez des patients ayant reçu la 1ère dose avant 12 mois. D’où la dernière recommandation de la HAS : 2 doses de ROR à tous les patients nés depuis 1980 et ajouter une 3ème dose à ceux ayant reçu la 1ère avant l’âge de 12 mois. La rougeole étant la maladie infectieuse la plus contagieuse, vérifier les carnets vaccinaux et rattraper si nécessaire !!!!

L’évolution de l’épidémie de coqueluche est aussi très inquiétante, notamment en Europe et en France. Comment expliquer cette remontée particulièrement marquée ces derniers mois ?

  • Alors que les couvertures vaccinales changent peu, les épidémies de coqueluche évoluent par cycles de 3-4 ans, témoignant d’une circulation à bas bruit de pertussis, immunisant la population en plus de la vaccination. L’épidémie actuelle est encore une conséquence de la pandémie, et de l’absence de circulation de nombreux pathogènes qui a conduit à une dette immunitaire…
  • Les couvertures vaccinales, excellentes chez les nourrissons nés depuis le 1er janvier 2018 du fait de l’obligation, sont correctes à 6 et 11 ans mais sont insuffisantes chez l’adulte.
  • Enfin, les vaccins coquelucheux acellulaires, les seuls disponibles actuellement en France, ont une efficacité suboptimale : très efficaces sur la « maladie coqueluche » à court terme, ils ont peu ou pas d’effet sur le portage de pertussis, et la durée de protection conférée par le vaccin apparait plus courte que celle induite par la maladie naturelle ou certains vaccins coquelucheux à germes entiers. Rappelons que si certains vaccins entiers pouvaient être remarquablement efficaces (pas tous), ils étaient très réactogènes, gênant les programmes d’association vaccinale (notamment avec les vaccins pneumococciques) et difficiles à fabriquer de façon stable.

Face à cette situation, la mesure la plus urgente est d’augmenter considérablement la vaccination des femmes enceintes (couvertures vaccinales actuelles autour de 18-20%) pour protéger les nouveau-nés et les petits nourrissons avant qu’ils n’aient reçu les 2 premières doses de vaccin.

Le congrès de l’European Society of Pediatric Infectious Diseases (ESPID), principal congrès de vaccinologie international, a eu lieu à Copenhague du 20 au 24 mai. Nombre de communications ont été consacrées à l’efficacité sur le terrain (effectiveness) du Nirsevimab (anticorps monoclonal anti VRS) dans les 4 pays qui ont pu l’implémenter : Etats-Unis, France, Espagne et Luxembourg. Dans chacun, elle a été de l’ordre de 75 à 90 % pour les bronchiolites hospitalisées. Les deux expériences les plus abouties sont celles de la Galice en Espagne et de la France.

En Galice, (Nbre naissances/an≃10.000), 85% des nourrissons de moins d’un an ont été immunisés avec une surveillance rigoureuse des hospitalisations pour bronchiolites : effondrement des hospitalisations pour bronchiolites à VRS dans cette tranche d’âge alors que pour les enfants plus âgés, l’épidémie a été d’une intensité habituelle ; l’effectiveness a été évaluée à 82% (IC95% = 65,6-90,2%)

  • En France (Nbre naissances/an≃000), seuls les nouveau-nés et les moins de 3 mois ont été immunisés. Sur les formes ambulatoires, l’impact chez les moins de 3 mois, évalué grâce au réseau PARI, a été marqué (réduction de 53% par rapport à l’année précédente, et baisse par rapport aux années pré-Covid) et l’effectiveness mesurée à 79,7% (IC95% 67%-87,3%). Seul résultat d’effectiveness en ambulatoire publié !
  • Sur les formes hospitalisées, l’effectiveness a été mesurée à 83% (IC95%= 73,4-89,2%). Pour les patients ayant reçu le Nirsevimab et ayant présenté une bronchiolite à VRS, la durée d’hospitalisation et d’oxygénothérapie ont été significativement plus courts.
  • Enfin, pour les nourrissons hospitalisés en réanimation, Santé Publique France a mesuré une effectiveness entre 76 et 81% (résultats non présentés à ce congrès).

L’effet de cette immunisation sur les autres pathologies à VRS du nourrisson reste à préciser : otites moyennes aiguës, pneumonies… selon les annonces gouvernementales, le Nirsevimab devrait être distribué en quantités suffisantes pour immuniser les enfants de moins d’un an, la saison prochaine. Si vous voulez avoir accès aux communications intéressantes de l’ESPID, cliquez sur ces liens : Lien 1, Lien 2, Lien 3.

En réponse à vos questions

Je vois une jeune fille de 18 ans qui pense n’avoir reçu qu’une dose de Gardasil® à 14 ans, mais elle a perdu son carnet de santé. Que conseillez-vous ?

En l’absence de sérologie possible, la réponse classique : ne pas en tenir compte et proposer à son âge un schéma 2+1. Mais une étude récente montre qu’à son âge, un schéma 1+1 (à au moins 6 mois d’écart) a une immunogénicité comparable au schéma 2+1 après la dose de rappel.  Nous vous conseillons donc d’appliquer plutôt ce schéma.

Doit-on retarder les vaccins d'un nourrisson de 3 mois et demi sous quadrithérapie pour tuberculose ganglionnaire non bacillifère ?

Non !!! Ni la maladie, ni les traitements reçus ne le justifient, d’autant plus que cet enfant appartient probablement à un milieu défavorisé (plus à risque pour les méningites, gastroentérites…)

Robert Cohen, Pierre Bakhache, Pierre Bégué, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Joël Gaudelus, Hervé Haas, Isabelle Hau, Cécile Janssen, Odile Launay, Maeva Lefebvre, Didier Pinquier, Anne-Sophie Romain, Georges Thiebault, Franck Thollot, François Vie le Sage, Catherine Weil-Olivier

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