Bulletin n°14 Décembre 2021
Vaccination des enfants de 5 à 11 ans : ne pas confondre vitesse et précipitation. La place des enfants dans la dynamique de l’épidémie revient au centre des revendications d’un certain nombre d’épidémiologistes, de médecins d’adultes et membres du gouvernement. L’empressement à vacciner les enfants n’est que le reflet de l’insuffisance de couverture vaccinale en primovaccination d’une partie de la population adulte, notamment celle à risque de formes graves, associée à des flottements logistiques lors de la mise en place de la dose « booster » chez l’adulte. Outre l’aspect éthique, le bénéfice collectif attendu de la vaccination des enfants ne peut être la raison principale de sa mise en œuvre : d’une part, parce qu’il ne sera effectif que dans quelques mois, pour autant qu’une proportion importante des enfants reçoive deux doses, ce qui n’est le cas ni aux États-Unis (<25% pour 2 doses, moins de 10% pour 1 dose), ni en Israël (<10%), et ce indépendamment de problèmes de logistique, et d’autre part, cet effet s’érode en quelques mois avec le variant delta (expliquant cette 5ème vague dans les pays bien vaccinés). De plus, son effet sur le variant Omicron est probablement très faible sans le boost. Ne serait-ce que pour le bénéfice individuel que les enfants pourraient en tirer (poids de la maladie et conséquences indirectes de la crise sanitaire sur leur quotidien), les pédiatres sont très favorables à la vaccination rapide des enfants à risque de forme sévère de Covid-19 et ne sont pas opposés à la vaccination de tous les enfants ( document lien 1 (8.51 MB) , pdf lien 2 (1.45 MB) ), à condition que :
- Les données de pharmacovigilance, en particulier américaines, canadiennes, israéliennes… confirment la bonne tolérance après la deuxième dose.
- Toutes les personnes dans l’entourage du foyer familial des enfants (parents et grands-parents inclus) mais aussi le personnel de la petite enfance qui les entoure, soient vaccinés.
- Les enfants ayant un antécédent d’infection à SARS-CoV-2 prouvée (PCR, test Antigénique ou sérologie) ainsi que ceux qui ont une sérologie (TROD) positive au moment de l’administration de la première dose, ne reçoivent pas une deuxième injection inutile. Les pédiatres estiment qu’une sérologie (TROD) en même temps que la première dose doit être systématiquement proposée aux enfants sans antécédent connu de COVID confirmé.
- Cette vaccination ne soit pas imposée mais « offerte » aux enfants/parents qui le souhaitent (craintes particulières, voyages, conviction…)
- Cette campagne de vaccination soit préparée et accompagnée.
Une précipitation dans le programme de vaccination des enfants serait contre-productive dans une période où les médecins (généralistes, pédiatres, libéraux et hospitaliers…) sont submergés par les épidémies hivernales et le système de soins pédiatriques au bord de la rupture. Mobiliser des forces pour vacciner avec des professionnels de l’enfance va être très difficile et risque de compliquer la prise en charge des soins pédiatriques non programmés, ainsi que les programmes de vaccination habituels.
Un programme raisonnable de vaccination, dans ses modalités et son timing, doit être mis en place et nous proposons donc :
- de commencer par vacciner le plus possible d’enfants à risque,
- de mettre en place la vaccination dans les collèges dès la 6ème (10-11 ans). Cela est cohérent avec la vaccination des adolescents de 12 ans et plus en collège (5ème, 4ème, 3ème),
- Proposer la vaccination à tous les enfants en primaire dès que seront mis en place des circuits de vaccination adaptés et supervisés par des professionnels ayant l’habitude de vacciner les enfants.
Par ailleurs, les pédiatres insistent sur le fait que, dans le contexte actuel, aucune contrainte de type « obligation vaccinale » ou « passe sanitaire » n’est acceptable pour les enfants.
Enfin, les pédiatres estiment que la mise en place d’une vaccination contre la maladie Covid, relativement bénigne chez l’enfant, devrait amener à reconsidérer l’intérêt d’autres vaccinations en routine contre des maladies dont le poids est avéré plus lourd chez les enfants : vaccination contre les gastro-entérites à rotavirus, la coqueluche chez la femme enceinte, les méningocoques ACYW (et rappel à l’adolescence), la varicelle, la grippe (vaccin nasal).
L’inscription en quelques jours du pdf Variant Omicron (B.1.1529) (1.24 MB) parmi les variants préoccupants par l’OMS, apparait plus que justifiée. Différentes études portant sur Omicron le situent par rapport au variant ∂. Il aurait :
- Une plus grande contagiosité (amenant possiblement le R0 au même niveau que celui de la rougeole).
- Une plus grande résistance à l’immunité naturelle post infection ou acquise après la primovaccination.
- Possiblement une moindre sévérité (expliquée en partie par la fraction de la population déjà immunisée par la vaccination ou la maladie).
Dans un communiqué, le laboratoire Pfizer précise que le schéma en 2 doses de son vaccin a peu (ou pas) d’effet neutralisant sur le variant Omicron ; en revanche, après la dose booster, le pouvoir neutralisant serait multiplié par 25 et deviendrait comparable à celui obtenu après 2 doses sur les souches ancestrales. Ce communiqué précise aussi que 80% des épitopes de la Spike reconnus par les CD8 ne sont pas affectés, suggérant que 2 doses de vaccins pourraient protéger contre les formes graves.
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