Bulletin n°12 Octobre 2021
Comme on l’avait envisagé il y a plusieurs mois, les épidémies sont de retour, remplissant les services de pédiatrie, saturant les urgences (le niveau d’activité le 15 octobre est comparable à celui du 15 décembre... avant la pandémie) et les services de réanimation pédiatrique. Les syndromes observés ne sont pas liés uniquement au VRS, mais aussi à d’autres virus : rhinovirus, para-influenzae, entérovirus… Ces épidémies pourraient être la conséquence de la dette immunitaire induite par le suivi des mesures barrières nécessaires contre la COVID-19, avec comme conséquence une proportion actuelle plus élevée de personnes (adultes et enfants) vulnérables vis-à-vis des infections saisonnières. De ce fait, la saison hivernale risque d’être difficile pour les enfants… et leurs soignants, déjà mis à l’épreuve par 20 mois de pandémie. Dans ce contexte, l’aboutissement de la recommandation par l’HAS de la vaccination rotavirus apparait plus que jamais nécessaire. En 2014, Santé Publique France estimait le fardeau du rotavirus en France à 430 000 épisodes de gastroentérite aiguë, 181 000 consultations, 31 000 passages aux urgences, 14 000 hospitalisations et une dizaine de décès par an. Le système de soins pédiatrique, aujourd’hui, peut-il se le permettre ?
Certaines données de l’étude du Comirnaty® chez les enfants de 5 à 11 ans ont été communiquées par Pfizer, et les dossiers déposés auprès des agences d’enregistrement. Il s’agit des 1ères données d’une étude en double aveugle (randomisée 2/1) réalisée en Amérique du Nord et dans plusieurs pays européens. 4 500 enfants ont été inclus : 2 200 âgés de 5 à 11 ans (objet de la soumission à la FDA et à l’EMA), 2 300 plus jeunes. Des dosages beaucoup plus faibles que ceux administrés chez l’adulte ont été utilisés : 0,10 mg pour les 5-11 ans (1/3 de la dose adulte), 0,03 mg pour les moins de 5 ans (1/10 de la dose adulte). Malgré ces doses plus faibles, l’immunogénicité et la tolérance étaient comparables à celles des jeunes adultes. Même si les résultats étaient considérés comme favorables par les agences, il faudra attendre les recommandations des comités nationaux. Les enfants présentant le plus souvent des formes mineures de la maladie, les décisions devront être prises en fonction des tendances épidémiques aux différents âges (incidence, hospitalisations, réanimations…) et du retentissement sur la vie des enfants : écoles, sports, autres activités… L’urgence de la vaccination des enfants n’apparait pas pour l’instant comme une évidence.
Comirnaty® ou Spikevax® ? Différentes recommandations laissent planer des doutes :
- Chez les adolescents : le Spikevax® n’est pas recommandé au Danemark, en Suède, en Finlande et au Québec.
- Pour le rappel, les Anglais et les USA l’utilisent à demi-dose ; en France, la HAS recommande pour l’instant préférentiellement le Comirnaty®. Le dossier d’enregistrement en cours d’évaluation par l’ANSM est un rappel à ½ dose de Spikevax®.
Ces recommandations, basées sur les mêmes références bibliographiques, sans explication claire, peuvent troubler, et pourtant, quelques lignes directrices apparaissent :
- Dans une étude comparative, les taux d’anticorps IgG anti Spike sont un peu plus élevés avec le Spikevax®, notamment chez les sujets non préalablement infectés, avec une différence significative. La quantité d’ARNm présente dans le Spikevax®, 3 fois supérieure, est évoquée pour l’expliquer.
- Pour les souches « ancestrales » et le variant alpha, il n’y avait aucune différence d’efficacité initiale entre les 2 vaccins, mais des études suggèrent une efficacité supérieure à 6 mois avec le Spikevax®.
- Pour le ∂, deux études (lien 1 et lien 2) suggèrent une meilleure efficacité du Spikevax® pour les formes « non graves » de la COVID-19, incitant à penser que la meilleure immunogénicité a des conséquences cliniques sur les variants moins sensibles aux vaccins.
- Cette plus forte immunogénicité de Spikevax® s’accompagne possiblement d’une réactogénicité plus importante, et d’une augmentation du risque de myocardites et/ou péricardites post-vaccinales.
- Enfin, il existe peu de données sur le Spikevax® en dose de rappel.
Dans les semaines à venir, on l’espère, des recommandations plus claires devraient être publiées, privilégiant les vaccins plus fortement dosés pour les sujets dont l’immunogénicité est la moins bonne ou la moins durable, ou diminuant les doses pour le Spikevax® pour les autres.
Bien que des cas soient rapportés, le COVID-Long ne représente pas un problème de santé publique en pédiatrie, contrairement à la population adulte. Si vous voulez en savoir plus.
Mieux comprendre l’infection à SARS-CoV-2, la pandémie et la vaccination.
L’Abécédaire des questions-réponses sur la vaccination COVID-19 a été mis à jour !!!
Les diaporamas des 24ème Journées de Pathologie Infectieuse Pédiatriques sont disponibles.
Robert Cohen, Catherine Weil-Olivier, Olivier Romain, Franck Thollot, Véronique Dufour, Pierre Bakhache, Marie-Aliette Dommergues, Joël Gaudelus, Hervé Haas, Isabelle Hau, Pierre Bégué, Odile Launay, Maeva Lefebvre, Didier Pinquier, Georges Thiebault, François Vie le Sage, Claire-Anne Siegrist.
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