Bulletin n°1 Janvier 2021
Une semaine après l’obtention de l’AMM européenne, la HAS a émis des recommandations sur l’utilisation du vaccin d’AstraZeneca contre la COVID-19. Compte tenu de son efficacité moindre, comparée à celles des deux vaccins à ARNm disponibles, estimée à 62,17 % (IC95 %, 50,56 ; 71,05) et du faible nombre de patients de plus de 65 ans inclus dans les essais cliniques, la HAS recommande de privilégier les vaccins à ARNm chez les personnes ≥ 65 ans. Le vaccin se conservant entre 2 et 8°C, il pourra être administré par les médecins, pharmaciens, sages-femmes et infirmières, hors centres de vaccinations. Son coût est nettement moindre et on peut espérer une plus grande disponibilité… à terme. La HAS recommande un délai de 8 à 12 semaines entre les 2 doses de vaccin, une étude démontrant une augmentation de l’efficacité à plus de 75% en cas d’espacement des doses. De plus, une étude complémentaire suggère un effet significatif de ce vaccin sur la transmission du SARS-CoV-2.
Concernant les autres candidats vaccins, voici les résultats annoncés ou publiés :
- Excellents résultats (publiés dans le Lancet) pour le vaccin russe : efficacité [91,6% (IC 95% 85,6–95,2)], le Sputnik V, adénovirus humains modifiés génétiquement pour exprimer la spike, inactivés, mais deux virus vecteurs différents dans les 2 doses administrées à 3 semaines d’intervalle (adénovirus 26 puis adénovirus 5) afin d’éviter que les anticorps dirigés contre les autres antigènes de l’adénovirus 26 utilisé lors de la première injection ne gênent l’accès du système immunitaire à la spike lors de la 2ème dose et en diminuent l’effet rappel.
- Excellents résultats (communiqués) aussi pour le vaccin Novavax (protéine Spike recombinante et nouvel adjuvant), avec 89% d'efficacité dans une étude anglaise incluant 15 000 participants de 18 à 84 ans. Efficacité de 60% en Afrique du Sud démontrant l’efficacité d’un vaccin incluant la spike du SARS-CoV-2 de 2019 contre le variant sud-africain, et c'est une bonne nouvelle !
- Résultats plus qu’intéressants (communiqués) pour le vaccin de Johnson&Johnson (Janssen pour sa branche pharmaceutique), un adénovirus humain (Ad26) génétiquement modifié pour exprimer la spike, se conservant plusieurs mois entre 2 et 8° et efficace en une seule dose : sur 44 000 participants (dont 13 000 >60 ans) la protection a atteint globalement 66% d’efficacité (85% pour les formes graves). Cette efficacité varie en fonction des pays : 72% aux Etats-Unis, 66% en Amérique Latine et 57% en Afrique du Sud où le variant prédominait à 95%, et c’est aussi une bonne nouvelle !
- Résultats moins bons pour le vaccin « traditionnel » chinois de Sinopharm (virus entier inactivé sur aluminium), avec seulement 50% d’efficacité au Brésil.
- Enfin, annonce par MSD de l’arrêt du développement de ses 2 candidats vaccins utilisant comme vecteurs le vaccin contre la rougeole (candidat vaccin français de l’I. Pasteur) ou le virus de la stomatite vésiculaire (VSV) (pourtant très efficace contre Ebola).
En réponse à vos questions.
Une dose de vaccin à ARNm est-elle suffisante ? Dans les études démontrant l’efficacité des vaccins à ARNm, les schémas comprenaient 2 doses administrées à un intervalle de 3 ou 4 semaines. Les tensions d’approvisionnement, l’apparition de variants plus transmissibles et l’orientation des recommandations d’autres pays, rendent la question d’actualité. Dans l’étude pivot de Pfizer-BioNTech, l’efficacité après le schéma vaccinal complet est de 95% (IC95% 90-98), et à partir du 10ème jour après la première dose de 86,7% (IC95% 68,6-95,4%). Les résultats du vaccin Moderna sont comparables après 2 doses et une dose. Les arguments contre l’utilisation d’une seule dose sont évidents : l’immunogénicité est 10 à 100 fois supérieure après deux doses, laissant augurer d’une protection plus prolongée, d’un effet supérieur sur la transmission, et possiblement d’une action plus marquée contre les variants. Les arguments des tenants d’une dose sont la bonne efficacité dès la première dose, non significativement inférieure à celle de deux doses, l’absence de corrélat de protection sérologique connu, et face à l’urgence épidémiologique, la possibilité de vacciner deux fois plus de personnes, ce qui peut avoir un intérêt évident. Deux éléments sont venus conforter ces arguments : l’efficacité sur le terrain du vaccin Pfizer en Israël dès la première dose et celle du vaccin de Jansen après une dose (mais ce n’est pas un vaccin à ARNm). Pour l’instant, le choix de la France et de la majorité des pays européens est de maintenir un schéma à 2 doses. Il y a débat sur l’intervalle entre les 2 doses des vaccins à ARNm de 4 à 6 semaines.
Sept jours après la vaccination par un vaccin à ARNm, un professionnel de santé a présenté de la fièvre, de la toux et une anosmie. Le test de diagnostic rapide du SARS-CoV-2 a été fortement et immédiatement positif. Faut-il lui faire la seconde dose ? Non !!! En tous cas pas tout de suite. Le diagnostic de la COVID-19 ne fait pas de doute : survenue précoce avant même que le vaccin puisse protéger, symptômes évocateurs et test fortement positif. Quelle que soit la forme clinique, les sujets infectés par le SARS-CoV-2 semblent protéger à 90% au moins 6 mois après l’infection. De plus, une infection préexistante semble augmenter la réactogénicité vaccinale, et la réponse immune obtenue est au moins égale à celle obtenue avec 2 doses de vaccins. Dans quelques mois (3, 6, plus ?) la question se reposera.
Robert Cohen, Catherine Weil-Olivier, Odile Launay, Joël Gaudelus, Pierre Bégué, Pierre Bakhache, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Hervé Haas, Isabelle Hau, Didier Pinquier, Olivier Romain, Georges Thiebault, François Vie le Sage, Claire-Anne Siegrist.
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